La traditionnelle tradition
I go solo
Sur ma planète d'origine, il y a une fête qui se célèbre en famille ou entre amis avec des spécificités qui m'ont toujours échappés. Souvent, il y a des illuminations et une ambiance qu'on qualifierait de "féerique". Il y a plusieurs festivités organisées un peu partout et celle de ma ville d'origine est un concours de poésie. Bah ouais, faut pas leur demander de faire des trucs cool comme des glissades en luge ou des trucs comme ça. C'est physique et l'adrénaline, c'est trop mal vu. Bande de rabat-joie de service.
A l'orphelinat où j'ai grandit, le directeur organise chaque année une grande fête. Il demande aux cuisines de faire des repas un peu spéciaux et il distribue des cadeaux personnalisés à chacun et chacune. Il a toujours mit un point d'honneur à connaitre tous ses pensionnaires. En vrai, quand j'y repense, c'est comme si j'avais une super grande famille, remplie de frères et sœurs de tout âge. Même si j'ai toujours fait attention de ne pas m'attacher à eux. La séparation était trop douloureuse et j'ai mis plusieurs années à comprendre qu'il ne valait pas mieux nouer des liens trop fort avec les gens de passage. Quand j'ai quitté ma planète d'origine et que j'ai rejoins la police temporelle, je n'ai pas pu retourner sur Xelaya les deux premières années pour participer à cette tradition. Je ne savais pas que ça m'embêterait autant de ne pas entendre ces foutus poèmes débiles ou alors de ne pas avoir ce moment après le repas de fête avec le directeur de l'orphelinat dans son bureau.
Ce moment, où on se posait tous les deux, autour d'une boisson chaude et où il me racontait des histoires sur son passé quand il voyageait à travers la galaxie. Je lui posais pleins de questions auxquelles il répondait volontiers et il n'était pas rare que je finisse par m'endormir sur ma chaise, bercée par ses récits d'aventures. Ce moment m'avait tellement manqué que dès la troisième année de mon départ, je suis retournée le voir sur Xelaya, chaque année. Alors, notre tradition a un peu changée.
La boisson chaude s'est transformée en boisson légèrement alcoolisée et c'était moi qui racontait mes aventures. Nos rôles étaient inversés, il me posait des questions et je lui répondais comme je pouvais. Je ne pouvais pas tout raconter non plus, parce que ça aurait été dangereux pour lui et c'était classé confidentiel mais l'essentiel était là. Je ne peux même pas qualifié le sentiment qui m'envahissait en voyant son regard empli de fierté qu'il avait quand il m'écoutait. Pourtant, je me vantais, j'en rajoutais des tonnes sur mes exploits et ça le faisait rire à chaque fois. C'est la seule personne qui je connaisse qui est amusé par mon arrogance naturelle. Peut-être parce qu'il était comme moi avant ? Parce qu'on se ressemble ? Je ne sais pas trop.
En tout cas, quand j'ai déserté, je me suis retrouvée coincée. Je ne pouvais plus y retourner librement, ils m'auraient retrouvés. Alors, j'ai trouvé une tactique. Chaque année, je retourne dans le futur qui est mon passé (ouais j'aime me compliqué la vie). Rien à battre de la loi temporelle, j'en ai rien à carrer des paradoxes, si ça peut me permettre d'avoir un jour de l'année rien qu'à moi. Un jour égoïste pour bénéficier de l'amour inconditionnel de cet homme que je considère comme mon père et qui me considère comme sa fille. Je ne laisserais jamais personne m'enlever ça.
Évidemment, ça n'a pas été simple au début. Comment trouver le bon créneau ? Il fallait que ça colle avec la temporalité de Xelaya pour tomber ce jour bien précis, qu'il me connaisse quand même, donc je devais être née pour ça. Il était, par conséquent, impossible que je prenne mon vaisseau à l'époque où je suis, 3020, pour aller le voir. Pourquoi ? Parce que je suis née en 3044. J'ai longuement calculé le bon moment pour apparaitre la première fois. L'année de mes 8 ans.
Bien entendu, il était surpris, choqué même la première fois que c'est arrivé. Il m'a prit pour une folle puis, il a cru que c'était lui qui délirait. Parce qu'il était impossible que la petite fille, qu'il venait ramener dans sa chambre, était la même personne que l'adulte devant lui. J'ai dû lui expliquer pour les voyages dans le temps, lui donner des détails de mon enfance pour prouver que c'était bien moi, Alara et pas un imposteur. Il a mit du temps à me croire mais il a fini par l'accepter. Et ainsi, notre tradition a reprit. Je me suis toujours arrangée pour ne jamais me croiser. J'arrive toujours au moment où mon moi du passé retourne dans sa chambre. Cette année n'est pas différente.
Je suis impatiente de le revoir, impatiente de lui raconter mon année en détail. Alors après m'être assurée qu'il est seul dans son bureau, j'y entre et dès que je le vois, je lui fais mon plus beau sourire sincère.
Salut 'pa, je t'ai pas trop manqué j'espère !!